Gérard Depardieu, l’arbre qui cache la forêt
Samedi 22 décembre 2012, par Lectures
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« L’acte de Depardieu n’est que le symptôme superficiel d’une tendance beaucoup plus profonde qui consiste à contester la légitimité de l’impôt et plus fondamentalement encore celle des cotisations sociales », affirment les sociologues Hambye et Siroux, dans une Carte blanche publiée hier par Le Soir.
Philippe Hambye (sociolinguiste - Université Catholique de Louvain) et Jean-Louis Siroux (sociologue FNRS/UCL) estiment que "Le choix de Gérard Depardieu de se domicilier en Belgique pour échapper à certains impôts sur ses revenus et son patrimoine n’en finit pas de susciter des réactions dans les médias. Des réactions en sens divers, puisque certains crient au scandale quand d’autres n’y voient aucun problème ou vont même jusqu’à souhaiter la bienvenue à une personne qui selon eux échapperait légitimement à « l’oppression » d’un « totalitarisme fiscal ».
Si comme le lecteur le comprendra aisément plus loin, le geste de l’acteur français nous est fort peu sympathique – c’est un euphémisme – nous sommes néanmoins frappés par la nature des critiques dont il fait l’objet. Notre propos n’est donc pas ici d’énoncer un énième jugement de valeur à l’égard de la décision de G. Depardieu, mais plutôt d’interroger les fondements des condamnations qui l’accablent.
Que lui reproche-t-on en effet ? A bien y regarder, simplement de faire, en toute légalité, ce à quoi un nombre impressionnant de discours nous invitent quotidiennement : à savoir maximiser son intérêt individuel en évitant de devoir partager ses richesses avec autrui. Comme la plupart des travailleurs en effet, G. Depardieu cherche à diminuer ses impôts, dans un contexte où ceux-ci sont essentiellement présentés comme une forme de saisie, sinon de spoliation, par l’État d’une richesse qui reviendrait de droit à celui qui doit la céder sous la contrainte de la loi.
Pourquoi le lui reprocher à une époque où les organisations patronales belges ou françaises ne cessent d’exiger une diminution des cotisations sociales destinées à financer la protection sociale ? Où est le scandale, dès lors qu’au-delà de toutes les possibilités d’évasion fiscale illégale, les États belges et français ont mis en place une série de dispositifs fiscaux permettant aux personnes ayant des revenus élevés de réduire fortement ou d’échapper totalement aux différentes formes de taxation qui sont en principe censées alimenter les caisses de l’État ?
Il nous semble que l’acte de G. Depardieu n’est que le symptôme superficiel d’une tendance beaucoup plus profonde qui consiste à contester la légitimité de l’impôt "